Quake fut pour moi, et sans doute pour beaucoup d'autres joueurs, une révélation. Un jeu d'une noirceur extrême à cette époque dominée par les fleurs et les princesses de chez Nintendo, il plongeait sa victime dans un univers lovecraftien aux relents médiévaux dans lequel l'horreur le disputait à l'atroce. C'était les débuts de la vraie 3D, et id confirmait leur place dans la légende du jeu vidéo.
Disposant d'un panel d'armes assez conséquent, dont le fameux Nailgun aux boîtes de cartouches estampillées "NIN" pour Nine Inch Nails, le jeu offrait un choix vaste de possibilités pour tuer des ennemis en nombre tout aussi important. Chiens, gardes, chevaliers, démons, morts-vivants... finissaient tranchés à la hache, cloués vifs ou troués à coup de fusil! De nos jour cela semble "normal", ou du moins "pas exceptionnel", mais repensez-y à l'époque où vous franchissiez les douves sur un pont-levis au bois vermoulu sous un ciel d'orage alors que des drapeaux déchirés flottaient dans le vent, annonciateurs de luttes sans merci imminentes.
Le level design était particulièrement travaillé, l'équipe d'id souhaitant exploitant au mieux la 3D que le fantastique moteur qu'ils avaient créé leur offrait. Ainsi la technologie se mêlait à l'archaïque dans Quake, et il n'était pas rare d'utiliser un ascenseur au panneau électrique tout en se battant contre un chevalier en armure et à l'épée ensanglantée. Ces niveaux étaient néanmoins fidèles à une logique certaine voulue par la compagnie, car après avoir choisi quelle difficulté semblait abordable pour vous, vous aviez 4 "mondes" à nettoyer de leurs habitants avant d'affronter Shub-Niggurath. Pour ajouter au plaisir de l'exploration, les concepteurs n'ont pas hésité à multiplier les "secrets": trappes, portes dérobées, niveaux secrets,... le joueur peut passer un temps presque équivalent à celui d'une partie réelle rien qu'à les chercher et à les visiter.
Lovecraft aurait vécu assez longtemps il n'aurait pas manqué de savourer la matérialisation de ses écrits, et le joueur amateur de cet univers littéraire dégustera avec délice chaque seconde passée dans le monde de cauchemar de l'auteur si controversé.